La récente flambée épidémique de fièvre Chikungunya qui a sévie dans l?Océan indien en 2005-2006, puis gagnée l?Europe en 2007, a mis en lumière un virus jusqu?ici mal connu : le virus Chikungunya (CHIKV), membre du genre Alphavirus de la famille des Togaviridae, transmis par les moustiques du genre Aedes. Ce virus se manifeste classiquement par des arthralgies et provoque une inflammation aigüe associée à des fièvres et éruptions cutanées pendant plusieurs jours. Tandis que les symptômes de la phase aiguë sont résolutifs en moins de deux semaines, des arthralgies peuvent persister pendant plusieurs mois voire années, ces données sont discutées par Jaffar et al.(Revue 1, publiée dans Microbes and infection, 2009).
Pour la première fois, des encéphalopathies consécutives à une transmission mère-enfant, a été mise en évidence à la Réunion (Revue invitée 2, Das et al. Publié dans Progress in Neurobiology, Sept. 2009). Depuis l?épidémie massive à la Réunion, notre équipe a constitué une cohorte de 49 patients, majoritairement âgés, suivis depuis leur arrivée à l?hôpital jusqu?à 12 à 18 mois après-infection. L?objectif de cette étude (Hoarau et al. 2009, soumis à Journal of Clinical Investigation)10 virus par mL de sang) étaient plus susceptibles de souffrir d?arthralgies chroniques évoluant en arthrites, en comparaison avec le groupe guéri.
Une activation forte du système immunitaire inné (mise en évidence par l?activation des cellules dendritiques/NK/CD4/CD8/B, un niveau élevé de chimiokines, ainsi que de cytokines Th1 mais non Th2) permet l?élimination du virus dans le sang en quelques jours mais non au niveau des tissus où nous avons identifié des niches localisées.
Nous avons en effet mis en évidence la présence de CHIKV (ARN et protéines virales) dans les macrophages synoviaux périvasculaires d?un patient chronique 18 mois après l?infection et ce malgré la présence de cellules T (CD4 et quelques rares CD8 cytotoxiques) et NK infiltrées. Au sein de ce tissu synovial infecté, nous avons observé une hyperplasie des fibroblastes, une forte angiogenèse, ainsi que des lésions tissulaires dues aux niveaux élevés de MMP et de mortalité cellulaire. Ces évènements pourraient contribuer à expliquer l?efficacité observée du méthotrexate, utilisé empiriquement lors des arthrites chroniques, mais pose la question d?un tel traitement immunosuppresseur dans un contexte de persistance virale. De façon intéressante, CHIKV induit l?apoptose, via l?activation des deux voies intrinsèque et extrinsèque, dans des cellules HeLa mais nos données démontrent également que le virus est capable de se cacher à l?intérieur des corps apoptotiques résultants permettant ainsi l?infection des macrophages d?une manière non phlogistique (P Krejbich Trotot, et al. 2009, J Virol, en cours de révision). Ce paradigme supporte l?idée que l?infection persistante des macrophages joue un rôle clef dans la progression vers une maladie chronique. De plus, nos données les plus récentes illustrent la capacité jusqu?à lors insoupçonnée du CHIKV à cibler les cellules gliales (particulièrement les astrocytes mais non la microglie). En effet, des cultures primaires d?astrocytes ainsi que des lignées cellulaires (CLTT) répliquent fortement le virus, engagent une forte réponse immunitaire innée et induisent l?apoptose afin d?éliminer le virus (Das et al. Soumis à Journal of Neuropathology and Experimental Neurology).
L?ensemble de ces études permet une meilleure compréhension de la physiopathologie du CHIKV et pourrait contribuer à la découverte de nouvelles cibles thérapeutiques nécessaires face à cette infection ré-emergente avec un impact mondial. a été d?identifier les marqueurs pronostics de l?inflammation chronique (« arthrite rhumatoïde-like ») associés à une probable persistance du virus. Nous avons ainsi établie que les patients âgés (plus de 60 ans) et ayant une charge virale extrêmement élevée (plus de 10).
Jury
- Brigitte AUTRAN, Professeur, Hôpital Pitié-Salpêtrière
- Philippe DESPRES, Directeur de Recherche, Institut Pasteur
- Philippe GASQUE, Professeur, Université de La Réunion
- Monique LAFON, Directeur de Recherche, Institut Pasteur
- Vincent LOTTEAU, Directeur de Recherche, INSERM - Lyon
- Paul MORGAN, Professeur, School of Medicine - Cardiff University
- Lisa NG POH, Directeur de Recherche, Singapore Immunology Network