Résumé :
L?évolution de la majorité des volcans basaltiques est marquée par des phénomènes récurrents d?instabilité latérale. De nombreux facteurs d?instabilité, impliqués dans des déstabilisations à long terme ou des effondrements de flancs instantanés, ont été recensés depuis l?événement majeur qui a frappé le Mont Saint-Helens en 1980. Cependant, le rôle de ces facteurs sur la stabilité mécanique des édifices est mal contraint dans la mesure où les glissements de flancs résultent en général de plusieurs causes simultanées. Notre étude se concentre sur une comparaison des caractéristiques morphologiques et structurales de deux systèmes basaltiques, La Réunion (Océan Indien, France) et Stromboli (Mer Tyrrhénienne, Italie).
Nous avons montré que, bien qu?ayant des volumes et des contextes géodynamiques très différents, les systèmes sont tous deux caractérisés par une activité intrusive intense le long de rift zones et ont subi des déstabilisations latérales récurrentes durant leur évolution. Parmi les facteurs d?instabilité, les exemples de La Réunion et de Stromboli soulignent l?influence majeure des complexes intrusifs dans la croissance et le démantèlement des volcans, comme le prouvent les études de terrain et la surveillance des ces volcans actifs. Les modèles classiques considèrent que le processus d?instabilité latérale en domaine volcanique résulte de la mise en place d?une ou plusieurs intrusions verticales, entraînant des mouvements de flancs le long d?une surface de glissement pré-existante. De nouvelles données de terrain obtenues au Piton des Neiges (La Réunion), ainsi que des données de littérature sur d?autres édifices, ont permis de mettre en évidence le rôle des intrusions sub-horizontales dans les déstabilisations de flancs et de caractériser la géométrie des intrusions sub-verticales et sub-horizontales au sein des volcans basaltiques. Cette étude compare les résultats de la modélisation numérique des champs de déplacements de surface crées par la mise en place d?intrusions magmatiques à faible / fort pendage dans les édifices basaltiques, grâce à une méthode d?éléments frontières mixte (Mixed Boundary Element Method), dans le but de déterminer le comportement mécanique d?un édifice soumis à des injections magmatiques sous différents champs de contraintes. Les résultats de cette étude montrent qu?un champ de contraintes anisotrope favorise le glissement le long des intrusions, généré par la contrainte cisaillante co-intrusive, à l?origine de déplacements à l?échelle du flanc de l?édifice. Ces déplacements de grande ampleur, préférentiellement liés à des intrusions subhorizontales, peuvent probablement déclencher des grands glissements latéraux si leur amplitude dépasse le seuil de stabilité de l?édifice. L?application des résultats théoriques à des exemples réels de déformation enregistrées sur des volcans basaltiques (dont La Reunion et Stromboli, au cours de leurs crises éruptives de 2007) révèle que le modèle de déstabilisation associée à des intrusions sub-verticales est un mécanisme pouvant générer des effondrements de flancs sur des petits édifices à fortes pentes comme Stromboli. De plus, nos données de terrain et les résultats de modélisation confirment l?importance des intrusions sub-horizontales dans l?évolution morpho-structurale des grands édifices basaltiques à faibles pentes comme le Piton de la Fournaise (La Réunion), l?Etna ou le Kilauea, et plus particulièrement dans les instabilités de flancs pouvant causer des tsunamis dévastateurs.