Quand Pluton a-t-elle été découverte ?

Entretien avec Robert Staehle et Lori Paul

Pluton a été découverte en 1930.

Un ouvrier agricole qui s'appelait Clyde Tombaugh avait été engagé comme une sorte de valet à l'Observatoire Lowell par les professionnels de cette institution qui avait été fondée à la fin du 18ème siècle spécifiquement pour trouver la neuvième planète et qui ne l'avait pas encore fait.

Finalement les personnes en charge ont décidé qu'il fallait faire ce que Percival Lowell avait voulu que fasse l'institution. Et quand ce jeune homme a envoyé quelques esquisses de la planète Mars qu'il avait faites depuis sa ferme du Kansas, ils ont été impressionnés par leur qualité. Il y a eu quatre aller-retours de courriers et dans la dernière lettre envoyée à Clyde Tombaugh dans sa ferme du Kansas par l'Observatoire Lowell, il y avait un ticket de bus en aller simple pour le voyage de mille cinq cents kilomètres du Kanzas en Arizona et ils l'ont engagé.

Il s'est rendu compte très rapidement qu'ils ne s'y prenaient pas bien dans leur recherche, et il est donc allé voir ses conseillers, ses employeurs et il leur a dit : " je crois que vous devriez procéder de cette façon plutôt que de la façon que vous m'avez dite...". Il les a convaincus que sa méthode était meilleure et ils s'y sont mis à l'appliquer. C'était en 1929, à l'automne 1929. Et en mars 1930, on a annoncé la découverte de Pluton. 

 

Comment le nom de la planète Pluton de planète a-t'il été donné ?

C'était la neuvième planète, que l'on recherchait depuis qu'Adam et Leverrier avaient découvert Uranus au siècle précédent.

Et donc l'observatoire Lowell a décidé de demander à tout le monde des propositions pour un nom et celle qui a été retenue est venue d'Angleterre, d'une petite fille de 11 ans qui a écrit une histoire très brève avec un peu d'assistance de son père pour dire pourquoi Pluton serait un bon nom pour accompagner le reste des planètes.

Cette petite fille s'intéressait à la mythologie, et parce que le Pluton est le Dieu des enfers et que la nouvelle planète se situait dans des régions lointaines sombres et froides où le Soleil lui-même n'est plus qu'une étoile parmi les autres, cela lui a semblé approprié que dans le panthéon des autres noms comme Mars et Jupiter, Neptune et ainsi de suite, que cette planète soit appelée Pluton. Cela a été accepté et repris par la Presse américaine et par la Presse mondiale et c'est parti de là. 

Ensuite, à partir de là, notre bon vieux Walt Disney a appelé " Pluto " le chien qui allait accompagner son Mickey Mouse dans les dessins animés, et on a aussi baptisé un élément du nom de " plutonium ". Ces deux utilisations ont survécu jusqu'à ce jour et je m'attends à ce qu'il y ait beaucoup d'autres choses qui aient été appelées " Pluto " en l'honneur de cette découverte.

Comment j'en suis venu à Pluton ? 

Entretien avec Robert Staehle

C'est un long parcours, et je vais essaiyer de vous le résumer... Je travaillais au JPL, le Jet Propulsion Laboratory, suite à l'intérêt que j'avais depuis très jeune, et j'étais frustré par le coût très élevé des missions effectuées au cours des années 1970 et années 80, où le JPL faisait voler deux missions par an.

Et donc, dans le courant de 1990 et au début de 1991, j'ai entrepris de voir dans d'autres disciplines de la construction mécanique comment les choses pouvaient être faites plus à bas prix que dans les affaires spatiales dont je m'occupais.

Et un jour, pendant que je faisais cela, j'ai eu une conversation avec une femme, de quelques années plus jeune que moi, avec qui j'avais fait un peu de travail a JPL, et qui s'appelait Stacy Weinstein. Nous sommes allés déjeuner et nous sommes retournés ensuite à son bureau et je lui ai demandé sur quoi elle travaillait.

Elle a dit qu'elle travaillait sur une mission vers Pluton, mais que cela n'aboutissait pas, parce qu'il faudrait vingt ans pour y arriver, que cela coûterait des milliards de dollars, que personne ne soutiendrait le projet et que son rapport finirait quelque part sur une étagère.

Je lui ai dit que je savais comment faire les choses moins cher et plus rapidement parce que j'avais appris à le faire, et que nous pourrions nous y prendre différemment ? Nous en avons discuté et elle a trouvé quelques idées qu'elle n'utilisait pas jusqu'alors pour imaginer des trajectoires et bien d'autres choses encore. Elle a mis tout ça dans son ordinateur et fait tourner les logiciels et le lendemain elle a trouvé quelques résultats qui lui ont semblé très prometteurs pour un petit vaisseau spatial pour pourait aller vers Pluton. 

 

Mais ce qui m'y a fait penser est en fait un événement qui s'était produit juste quelques heures avant notre déjeuner.

Le Service des Postes Américaines venait de dévoiler une série de timbres commémorant l'exploration de système solaire par les États-Unis et ils avaient voulu un nombre pair de timbres, donc ils en avaient dix et comme évidemment il n'y a que neuf planètes dans le système solaire, ils avaient ajouté la lune de la Terre pour faire 2 x 5 timbres commémoratifs. Et l'histoire que j'ai entendue plus tard venant de l'artiste - je crois que c'était Don Dixon - qui avait fait les timbres de l'exposition c'est quon lui demandait de faire un dessin approximatif de ce à quoi chaque planète ressemblait et ensuite de représenter le premier vaisseau spatial américain ou un vaisseau spatial américain qui était allé voir la planète. Il a commencé avec Mercure et avancé peu à peu dans le système solaire. Quand il est arrivé à Neptune, il a évidemment dessiné Voyageur 2, qui était passé là peu avant. Et ensuite il est arrivé à Pluton et il a appelé son sponsor au Service des Postes pour lui dire : " maintenant qu'est-ce que je fais ? ". Et la personne du Service des Postes a répondu : " Que vous voulez dire, qu'est-ce que je fais ? Vous faites comme vous avez fait avec les autres ! ". Et l'artiste a dit : " Mais nous n'avons pas envoyé de vaisseau spatial là-bas ! - Alors dessinez juste ce à quoi ressemble la planète et nous réfléchirons à quelque chose - Mais nous ne savons pas non plus à quoi ressemble cette planète ! " . Et donc il a inventé quelque chose et ils ont décidé qu'au lieu du nom du vaisseau spatial qui accompagnait chacune des autres planètes, ils mettraient les mots " pas encore explorée ". 

Donc ces timbres ont été dévoilés pour une cérémonie du premier jour dans l'auditorium Von Karmann du JPL. Je suis arrivé un peu en retard, mais j'ai vu les timbres et j'ai vu celui qui disait " pas encore explorée " et j'ai cru qu'il y avait écrit : " pourquoi pas encore explorée ? ". J'ai pris çà comme un défi. Ensuite j'ai vu Stacy cet après-midi-là, et nous avions cette conversation, et c'est comme çà que nous nous sommes mis dans les histoires de Pluton. A partir de là cela a été un parcours très alambiqué, mais nous avons commencé avec les études d'ingénierie de base et sommes allés de là aux questions du financement d'études plus détaillées, et ensuite c'est devenu autant un défi de trouver des gens qu'un défi d'ingénierie proprement dite. Il y avait beaucoup de questions qui se sont posées en route dans mon travail. Mes supérieurs au JPL ont aimé ce que je faisais, même si ce n'était pas au début des affaires tout à fait officielles, mais c'est devenu officiel assez rapidement, et mes supérieurs m'ont dit : " Votre travail, Rob, c'est de faire entrer la mission Pluton dans le budget fédéral ". Et notre équipe a réussi à le faire, c'est entré dans le budget qui a été approuvé par le Congrès et par le Président deux années de suite. Je crois, je ne sais plus à une année près, que c'est en 1995 que nous sommes entrés dans dans le budget fédéral. 

Donc nous y sommes parvenus, mais je me souviens d'une conversation que nous avions eue très tôt dans le développement de la mission Pluton après que nous avons franchi le pas de la crédibilité. Cela devait être au début de 1992, il y avait plusieurs d'entre nous, Stacy et Rich Terrile et quelques autres assis ensemble en train de parler, et l'un d'entre nous a dit : " Vous savez, ils ne vont pas nous permettre de le faire, parce que nous sommes tous des jeunes gens, avec peu d'expérience et on nous attend au travail, mais une fois que nous en serons arrivés au point où le projet sera accepté dans le budget fédéral et dans les plans de Nasa, alors on nous dira merci beaucoup les petits et maintenant laissez faire les grands garçons...". Nous avions ensuite oublié cette conversation et nous nous étions concentrés sur l'acceptation de la mission. 

Mais quelque temps plus tard, la mission a en fait été annulée par Nasa, parce que l'Administrateur Associé pour la science spatiale de l'époque a dit que personne ne s'intéressait à Pluton. Il n'y avait aucun intérêt scientifique pour Pluton et le public ne s'y intéressait pas non plus. Mais immédiatement après l'annulation, dans les deux semaines qui ont suivi, il y a eu plus de dix mille cartes, de lettres et de courriers électroniques envoyés à des hauts fonctionnaires partout dans Washington, aux administrateurs de la Nasa, aux sénateurs, aux membres du Congrès, et même au Président, qui ont reçu ces lettres et ces cartes et ces messages de partout aux États-Unis, qui disaient : " Pourquoi avez-vous annulé la mission Pluton ? Quelle chose stupide vous avez faite ! ". Et donc cette hypothèse qu'il n'y avait aucun soutien en faveur de la mission Pluton a été prouvée fausse et ensuite, assez peu de temps après cela, l'Académie Nationale des Sciences a sorti un rapport sur les priorités pour l'exploration du système solaire et des petites planètes, et elle a mis Pluton au sommet de sa liste des priorités. Elle a dit que c'etait une mission que nous devions faire. Donc maintenant que le public et la communauté scientifique étaient solidement derrière la mission, il s'en est suivi une compétition, remportée par Alan Stern, qui avait été l'un de nos plus grands partisans dès le début, avec son Groupe de Travail des Sciences des Planètes Extérieures. Il nous avait permis à Stacy Weinstein, à Rich Terrile et à moi-même de parler de notre concept d'une mission plus petite et moins chère. Et il avait monté une équipe pour cette compétition, pour mettre sur pied le reste de la mission, la reprendre là où JPL s'était arrêté et repartir de là. 

Je suis convaincu que c'est une chose qui a permis que notre mission aille de l'avant. Dans notre système politique, nous avons des sénateurs différents qui ont des tâches différentes, et le Président du Comité des Science du Sénat était l'un des deux sénateurs du Maryland, là où se trouvait Alan Stern. Je crois qu'Alan Stern et son équipe du Laboratoire de Physique Appliquée ont gagné parce qu'ils avaient écrit la meilleure proposition. Certaines personnes ont dit qu'ils avaient gagné pour les raisons politiques, je ne crois pas personnellement que ce soit le cas, mais je pense que si ce n'était pas cette proposition du Maryland qui avait gagné, que le sénateur de Maryland n'aurait pas été en position de force pour la défendre, parce qu'il y avait deux autres sénateurs qui étaient opposés à la mission, dont l'un a réussi à la faire annuler de nouveau. La sénatrice du Maryland est arrivée à contrer cette annulation. 

La mission a pu suivre son cours et elle a finalement été lancée en janvier 2006. Lori et moi étions là au lancement, et Patsy, la veuve de Clyde Tombaugh était là, et Jim Christy et je ne peux pas me souvenir du nom de la femme de Jim, mais les familles étaient là et de nombreuses personnes de la famille de Tombaugh étaient là et nous avons tous été traités comme des rois. Nous avons observé le lancement depuis les nouvelles installations de la Nasa au Centre Spatial Kennedy, spécialement construites pour l'observation des lancements par le public. Il y avait de la nourriture splendide, il y avait des gens splendides, il y avait des panneaux d'afficage pour montrer comment se passait la mission. On pouvait même voir les deux navires de poursuite dans l'Océan Indien et la station de poursuite sur l'ile de La Réunion, pour le cas où la trajectoire aurait suivi un parcours où elle n'aurait été visible que de là au moment de la manoeuvre de finale du lancement. C'était un grand événement. 

La mission est en route, elle a passé Jupiter en faisant avec succès une répétition générale de la rencontre avec Pluton, avec la mise en marche de tous les instruments et le recueil au passage de données sur Jupiter et ses différents satellites. C'était réussi de manière spectaculaire, en faisant même quelques nouvelles découvertes. Maintenant la mission est sur sa trajectoire pour le reste du long voyage entre Jupiter et Pluton.

Et donc c'est comme ça que j'en suis arrivé à Pluton.

Comment je suis devenu ingénieur

J'avais 6 ans, et un jour, je me souviens, on m'a appelé dans le salon de la maison où j'ai grandi à Rochester, dans l'Etat de New York, pour regarder un événement très important à la télévision.

Je ne savais pas du tout de quoi il s'agissait, mais c'était la fusée d'Alan Shepard, une Redstone, qui était posée sur la plate-forme de lancement à Cap Canaveral, en Floride, et il y avait mon frère John, j'avais 6 ans et lui il devait en avoir 10 ou 11 et bien sûr il savait tout, et il m'expliquait qu'Alan Shepard était sur le point d'être lancé dans l'espace.

C'était assez intéressant, mais quand j'ai vu en direct à la télévision, la fusée s'allumer, quitter la terre et foncer vers les cieux, quelque chose en moi m'a dit : voilà ce que je veux faire ! Et depuis j'ai toujours été totalement fasciné par l'espace. Pendant quelques périodes de mon enfance, j'ai aussi été fasciné par le monde de la nature, j'y suis revenu plus tard, mais l'espace a toujours ma première fascination.

Pendant les missions Gemini et Apollo, chaque fois qu'un lancement devait avoir lieu, je me débrouillais toujours d'une façon ou d'une autre pour avoir une petite maladie, pas bien grave mais assez sérieuse, pour je reste à la maison et que je puisse regarder la télévision au lieu d'aller à l'école. Et je lisais tous les articles dans les journaux et je regardais tout ce que je pouvais à la télévision.

Et puis, à la fin de mes années de lycée, j'ai vu une affiche collée sur un mur de l'école de Harley que je fréquentais à Rochester, et elle disait quelque chose comme quoi on pouvait proposer sa propre expérience pour le Skylab, dont il était alors prévu qu'il soit la première station spatiale des Etats-Unis. Ce que j'ai immédiatement interprété comme le fait que je pourrais probablement avoir six semaines de dispense de cours une proposition. J'ai lu l'affiche, elle indiquait donc que la NASA sollicitait des propositions pour des expériences d'élèves de lycée pour envoyer avec le Skylab.

Cela ne m'a pas semblé crédible que je puisse vraiment rédiger une proposition qui aurait comme conséquence une expérience effective, mais cela m'a semblé complètement crédible que mon professeur de Physique me dispenserait des cours pendant six semaines pour rédiger cette proposition. Ainsi donc, je suis allé voir mon professeur principal et je lui ai dit que j'étais intéressé pour rédiger une proposition et que cela me demanderait probablement beaucoup de travail. Et il a dit que je travaillais bien en Physique, que ce serait possible, de combien d'heures est-ce que je pensais que j'aurais besoin ?

J'ai dit probablement six semaines? Et il m'a dit bien, vous pouvez avoir six semaines de dispense de cours de Physique, mais il a été honnête et il m'a dit que la première chose que je devais faire était de proposer quelques idées de ce que mon expérience pourrait être.

Et en deux ou trois jours j'ai écrit neuf idées différentes et suis revenu pour les lui décrire. Nous avons parlé de chacune de ces idées et nous avons convenu que probablement la meilleure des idées que j'avais trouvées était celle de faire voler des bactéries à bord de Skylab et de les faire se développer dans le même environnement que celui dans lequel vivait l'équipage, peut-être dans un incubateur mais dans la même atmosphère, dans la même impesanteur etc... .

Quelque chose comme une culture d'algues ou de quelques autres choses. Et ainsi j'ai commencé à rédiger, assez lentement, nous étions en novembre, la proposition qu'il fallait rendre au mois de février. Et tout naturellement comme le font la plupart des élèves de lycée j'ai terminé d'écrire ma proposition dans la nuit juste avant la date limite de l'envoi par la poste.

C'est alors j'ai lu le paragraphe qui indiquait que je devais envoyer trois exemplaires, et je n'en avais qu'un, alors nous avons trouvé une manière de faire des copies sommaires avec un thermofax, je pense que ça s'appelait comme ça, et je les ai mises dans une enveloppe, j'en ai gardé une, et j'ai mis l'enveloppe dans une boîte aux lettres. Et me voilà de retour dans mes cours de Physique, la récréation était terminée !

Je pense que c'est environ un mois plus tard, que le proviseur m'a appelé dans son bureau et il m'a dit j'ai cette petite chose pour vous, c'est un petit insigne de la Nasa, et apparemment vous avez été déclaré l'un des lauréats pour la région de l'Etat de New-York. Votre proposition a été considérée comme l'une des meilleures de toutes celles qui sont venues des écoles de l'Etat de New York. Ok, merci beaucoup, et retour en classe.

Je n'y ai plus pensé, et je n'en ai même pas parlé à mes parents. Et quelques semaines plus tard, j'étais à la maison, pour une raison quelconque nous n'avons pas école ce jour là, mais c'était un jour de semaine, et le téléphone sonne, c'était avant les emails, ici une opératrice de Western Union, j'ai un télégramme pour Robert Staehle, est-ce que je pourrais parler avec lui, svp.

J'ai dit que j'étais Robert Staehle, alors elle a dit bien et elle a lu ce télégramme très long, cela doit lui avoir pris dix bonnes minutes, disant que j'avais été sélectionné en tant que lauréat national pour les expériences d'étudiants à bord du Skylab. Et elle donné beaucoup de détails que je devais noter au sujet de qui je devrais appeler et qu'il y aurait une conférence pour tous les étudiants gagnants à Huntsville, en Alabama, et que nos parents et nos professeurs devraient venir, l'agent de voyage avec lequel nous devrions prendre contact pour faire nos réservations, et ainsi de suite.

Il y a eu 25 lauréats nationaux pour 3209 candidatures, et la NASA a fait effectivement voler 19 des expériences étudiantes, y compris la mienne, qui était une expérience bactériologique, mais la plus célèbre était celle avec Anita et Arabella, les deux araignées qui ont tissé des toiles à bord du Skylab. Il y en avait une sur la mesure du volcanisme avec des instruments infrarouges, et il y avait aussi celle qui a découvert des rayons X venant de Jupiter, après que le scientifique qui passait en revue les propositions avait dit qu'il n'y a rien à trouver de ce côté là, que cet étudiant n'avait aucune idée des rayons X ni comment ils étaient produits et que c'était impossible, mais pour faire plaisir à la communauté des professeurs de sciences, ils ont tourné le télescope de rayons X du Skylab vers Jupiter et en fait on a trouvé des rayons X venant de Jupiter, qui n'étaient pas censés exister.

C'est comme ça que j'ai commené dans l'espace. J'ai décidé que je ne voulais pas devenir bactériologiste suite à mon travail sur cette expérience. Ca m'a semblé un peu fastidieux, c'était certainement fascinant mais ce n'était pas mon intérêt central. La technologie était mon intérêt principal, de concevoir des choses qui fonctionneraient et qui iraient dans l'espace, qui fonctionneraient dans l'espace, et donc, je suis allé à l'Université de Purdue pour y étudier la technologie aérospatiale, parce qu'un de mes amis y était allé, et aussi, c'est là où Neill Armstrong avait reçu son diplôme.

Quand je suis entré à Purdue, le conseil que j'ai obtenu systématiquement de chaque ingénieur que mon père me présentait était : n'allez pas dans la technologie, il n'y a pas de travail, et si vous choisissez quand même d'entrer dans la technologie, surtout n'allez pas dans le spatial, parce là il n'y a vraiment rien à faire. C'était parce que le programme Apollo était en décroissance rapide et que cent mille ingénieurs qui avaient travaillé sur le projet venaient d'être licenciés à travers le pays.

Dans mon lycée, tous les jeunes gens et jeunes femmes qui avaient les mêmes intérêts moi entendaient les mêmes conseils, mais c'est des conseils que je n'ai pas suivis.

Et quatre ans plus tard, quand j'ai reçu mon premier diplôme, il y avait trois offres d'emploi pour chaque nouvel ingénieur aérospatial diplômé. Le JPL avait envoyé une équipe de recrutement à la recherche de candidats, et ils avaient indiqué dans les instructions posées sur les panneaux d'affichage « nous recherchons seulement des candidats avec des maîtrises ou des doctorats ».

Je venais d'avoir ma licence, mais il y avait écrit en bas de la page : « si vous ne possédez pas ces qualifications, allez voir le directeur de votre école, et c'est lui qui décidera si vous pouvez avoir un entretien avec le JPL ou pas ». Il y avait une autre personne que je ne connaissais pas à cette époque, Bob Cesaron, de l'Université de l'Illinois, qui travaille aussi au JPL, et qui était dans le même cas que moi. Je suis allé voir mon conseiller, et j'ai eu la permission de me présenter aux entretiens. Le JPL a entendu pas mal de monde à chacune des deux écoles, tous les autres avaient des maitrises ou des doctorats, mais Bob Cesaron et moi ont été les seul qui ont été invités pour des entretiens au JPL et tous les deux nous avons été engagés.

C'est ainsi que le 5 juillet 1977, je suis entré au JPL pour commencer à travailler sur le projet Voyager, et que depuis, j'y ai occupé des fonctions variées.

 

Petits secrets de fabrication

A un moment donné, j'ai pensé qu'il devait y avoir une manière différente de réussir dans l'exploration de l'espace autrement que par la philosophie du très cher que nous avions tous dans nos affaires. C'est ainsi que je suis allé rendre visite à plusieurs institutions, et celle qui m'a fait la plus grande impression, c'est une institution qui avait déjà lancé effectivement plusieurs satellites avec succès, de manière très économe, c'était la communauté AMSAT, la société des satellites de radio-amateurs des Etats-Unis, et les groupes semblables de radio amateurs passionnés tout autour du monde. A cette époque, il avaient lancé pas moins de huit satellites, qui avaient tous été des réussites. En fait j'ai un ami personnel que j'ai rencontré par l'intermédiaire de mon frère à Boulder, dans le Colorado, un homme qui s'appelle Bill Mc Caa, qui travaillait dans les systèmes de communication. Il avait organisé le développement de systèmes de communication pour tous les services d'urgence du comté de Boulder, le corps de sapeurs-pompiers de la ville, le Département de la Police etc... .

Mais dans son temps libre, c'est littéralement dans son garage, dans sonsous-sol, qu'il a construit le transpondeur en bande S pour le satellite AMSAT Phase-III, qui est parti avec le premier satellite Amsat lancé parAriane. Il m'a dit des tas de choses, et montré des tas de choses qu'il avait, et je lui ai demandé : Bill, ça a coûté combien ?  C'était à  l'époque une pièce d'électronique assez sophistiquée, par certains côtés plus sophistiquée que tout ce que les organismes gouvernementaux avaient fait voler, et il utilisait beaucoup moins de puissance pour fonctionner, ce qui est très important dans des affaires de l'espace, et donc j'ai demandé à Bill ce que ça avait coûté ? Il a dit qu'il n'était pas vraiment sûr, il pensait que c'était de l'ordre de cent trente-cinq dollars et j'ai dit : vous voulez dire 135 000 dollars ? Il a dit que non, c'était bien 135 dollars. Il a dit que la plus grosse dépense, c'était quand il  a eu fini et qu'il a dû les l'envoyer du Colorado vers la Côte Est où le éléments du satellite étaient assemblés, et cela faisait environ 50 dollars pour l'envoyer en express. Les pièces, il les avait obtenues de diverses sources, il les avait  toutes examinées pour s'assurer qu'elles fonctionneraient, et ce satellite a été lancé, il n'est pas allé sur l'orbite géostationnaire, il est resté sur la même orbite de transfert que la fusée Ariane. Il avait été conçu pour durer pendant une année, et je crois qu'il a duré pendant huit années, jusqu'à sa rentrée dans l'atmosphère. J'ai donc appris que ces personnes avaient beaucoup d'expérience et beaucoup à dire au sujet de la manière de construire des choses avec peu d'argent.

Ensuite je suis allé rendre visite à quelqu'un que j'avais rencontré à Bechtel Corporation, l'une des principales sociétés américaines en matière de technologies et j'ai vu la façon dont chacun à Bechtel, chaque ingénieur de chez Bechtel, à la différence de n'importe lequel d'entre nous dans le programme spatial, pour tout ce qu'ils pensaient faire, pour chaque petite chose qu'ils faisaient, pour chaque ligne qu'ils traçaient sur un plan, pour chaque chargement de terre qu'ils pensaient devoir déplacer d'ici à là afin de préparer un chantier de construction, ils prenaient en compte ce que cela coûtait. Chaque ingénieur était un ingénieur de coût. Chez nous, dans les affaires spatiales, il y avait des ingénieurs qui faisaient le vrai travail de conception et ensuite ils passaient leur travail à un groupe de coût qui estimait les coûts, et naturellement personne n'aimait les réponses qui revenaient. Le groupe de coût n'avait pas été impliqué directement dans la conception dans la plupart des cas et ainsi l'effort de conception était divorcé de la compréhension des  coûts. C'est quelque chose que nous avons un peu changé pour la mission sur Pluton.

Et puis, je suis allé rendre visite à des personnes du laboratoire Laurence Livermore, l'un des laboratoires du Ministère de l'Energie des Etats-Unis, qui travaillaient sur destrès petits instruments. Et alors que nous avions des caméras qui étaient approximativement de la taille et de la masse de fours à micro-ondes, ils m'ont montré une caméra avec des performances similaires qui était la taille d'un paquet de cigarettes. Maintenant naturellement vous pourriez avoir une caméra de la taille de l'extrémité de votre doigt, mais c'était inconnu en 1991.

C'est en rassemblant ces idées de différentes disciplines de la technologie et de différentes sortes de groupes culturels que nous avons pu changer la mentalité du JPL. J'ai dit que nous faisions de l'ordre de deux missions planétaires par décennie pendant les années 70 et les années 80, et maintenant nous faisons deux missions planétaires et parfois plus chaque année, avec des petit budgets !